La société coopérative DALIBO fête ses 20 ans aujourd’hui même, l’occasion de revenir sur les raisons du succès de cette aventure collective.
Parler de la réussite de DALIBO c’est d’abord parler de celle de la communauté PostgreSQL. Lorsque nous avons créé la société en 2005 avec Jean-Paul Argudo, Dimitri Fontaine et Alexandre Baron, PostgreSQL était un projet marginal, confidentiel et peu attractif. Deux décennies plus tard, c’est devenu la base de données dominante : un choix évident, un consensus auprès de la plupart des développeurs, des administrateurs et des décideurs…
Alors aujourd’hui je pourrais facilement vous raconter la fable d’une entreprise visionnaire, une pionnière qui savait avant tout le monde que Postgres allait tout manger sur son passage….. Mais la vérité c’est que nous avons eu la chance de monter dans le bon train au bon moment :-)
En 2005, même si j’avais l’intuition que ce train Postgres nous emmènerait loin, il était difficile d’imaginer que le voyage nous conduirait tout en haut du marché des bases de données… A cette époque, Oracle était probablement l’entreprise informatique la plus puissante du monde, Microsoft SQL Server avait sa propre base d’utilisateurs indéfectibles, MySQL était l’étoile montante auprès des développeurs web et la hype du NoSQL allait bientôt démarrer….
Sur le papier, PostgreSQL semblait être le vilain de petit canard de la bande : pas d’interface flashy pour les développeurs, pas de benchmarks détonants, pas de communiqués de presse ronflant, ….
Mais avec le recul, l’ingrédient principal du succès était déjà là : une communauté ouverte, décentralisée et autogérée.
Lorsque j’ai participé à la création de DALIBO, je me souviens clairement à quel point l’accueil de la communauté a été chaleureux et stimulant : des personnes comme Bruce Momjian, Simon Riggs et bien d’autres encore nous ont soutenus, encouragés et inspirés.
Car ce qu’il y a de si unique dans la communauté Postgres, c’est le sens du commun qui la traverse.
Ce que j’entend par “sens du commun” c’est la capacité pour des individus de percevoir, comprendre et valoriser ce qui les unit au sein d’une même collectivité. Lorsque des personnes arrivent à se saisir ensemble d’un objectif commun, de valeurs partagées, ils et elles transcendent la simple sommes des particularismes individuels et produisent une forme d’intelligence sociale puissante et créative. Une intelligence sociale qui peut concurrencer des multinationales et produire des logiciels gratuits et de meilleures qualités que toutes les alternatives commerciales.
A l’inverse le “sens commun” n’est souvent qu’un agrégat d’opinions et de pseudo-vérités partagées largement mais rarement discutées. Par exemple, en 2005, le sens commun nous disait qu’il était impossible de créer une entreprise dédiée au développement de logiciels libres, gratuits et open source ;-)
Et c’est grâce à ce sens du commun qui anime sa communauté, que Postgres a lentement mais sûrement révolutionné le secteur des bases de données et qu’elle a permis à de nombreuses sociétés de prospérer…. Parmi ces sociétés il y a donc DALIBO, qui se tient depuis 20 ans sur les épaules des milliers de contributeurs de la communauté Postgres.
Je voudrais profiter de ce billet de blog pour exprimer ma gratitude à toutes les personnes qui ont et qui vont participer à cette immense aventure collective, quelle que soit la nature de leur contribution et leur niveau d’implication. Vous avez toutes et tous participé indirectement au succès et à la structuration de DALIBO
Car DALIBO ne s’est pas contentée de profiter des richesses de la communauté Postgres, nous avons au fil des années construit un modèle social inspiré de celui de la communauté Postgres. En devenant une société coopérative en 2011 et en instaurant des principes collectifs forts comme le partage égalitaire des bénéfices, la transparence salariale ou l’élection des dirigeants, nous avons toujours cherché à stimuler et perpétuer ce sens du commun qui nous a emmené si loin tous ensemble….
Aujourd’hui DALIBO est la seule société coopérative parmi les sponsors majeurs du projet PostgreSQL. Bien sûr, notre modèle social peut paraître marginal, confidentiel et peu attractif. Le sens commun actuel semble nous dire que l’innovation technique n’est possible que via des levées de fonds, des startups disruptives et des acquisitions à coups de centaines de millions de dollars…. Toutes ces formes issues du capitalisme moderne semblent un horizon indépassable mais qui sait ? Peut-être que dans 20 ans, le sens du commun transcendera non pas simplement le secteur de l’informatique mais également les entreprises elles-mêmes et que nous verrons ensemble émerger des formes d’organisation du travail plus démocratiques, plus transparentes, plus respectueuses des individus et de l’environnement !
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